ILLTOO : « Ici on manque de reconnaissance ».

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Illtoo : "Je continue d'écrire, d'enregistrer et de faire des clips". Photo/Jean-Fabrice TIOUCAGNA
Illtoo : "Je continue d'écrire, d'enregistrer et de faire des clips". Photo/Jean-Fabrice TIOUCAGNA

Je m’appelle Illtoo. J’ai grandi à la Paillade. Je travaille actuellement à la Maison pour tous Louis-Feuillade. Cela ne m’empêche pas de faire un constat un peu amer. Ici, on manque beaucoup de reconnaissance. A tous les niveaux : sportif, artistique. Nous, rappeurs de la Paillade, on n’a jamais été sollicités par les acteurs sociaux pour des projets. En 2015, j’ai donc créé mon association  “Kryptonite music” avec Chaibotch. C’est d’ailleurs lui qui en est le président. Moi, je ne suis que bénévole. En fait, j’en avais marre. Il y a une structure qui a les moyens de faire exploser la culture ici mais qui ne fait rien. C’est une réalité. Ces dernières années, pas une seule fois ils n’ont fait, par exemple, une compilation musicale des jeunes artistes du quartier. Alors qu’il y en a beaucoup ici. En fait, on a fondé notre association pour être indépendants et s’auto-produire. Nous ne sommes pas subventionnés. Nous n’avons rien demandé à personne. Nous possédons notre propre studio, domicilié chez moi. Nous avons acheté notre matériel. 

Cela fait quatre ou cinq ans que nous demandons un local conventionné afin de faire évoluer le monde artistique et la culture du quartier et je vois que nous ne sommes pas entendus. Nous ne sommes pas pris au sérieux. La plupart des gens que j’ai connus, qui ont des diplômes, qui ont évolué dans le sport ou dans le domaine artistique, se sont “échappés” de la Paillade. Ils sont partis à Paris ou dans d’autres villes… A la Paillade, ce n’est pas facile.Il y a un laisser-aller. Nous ne sommes pas écoutés, ou alors on laisse le micro à des personnes qui ne sont pas représentatives du quartier. Il faut changer les mentalités.

Et cela commence d’abord par l’éducation. Il faut mettre en avant les vrais acteurs sociaux qui connaissent les vraies problématiques du quartier pour pouvoir les régler.

A la Paillade, la plupart des gens veulent s’en sortir. Tout n’est pas noir. Il faut de l’échange, des rencontres. Il faut mutualiser les talents. A la Paillade, il y a quasiment trente mille personnes dont 60% sont des jeunes de moins de 25 ans. Ce sont eux qui consomment la culture. La Paillade est un gros centre culturel en réalité mais il manque de connexion entre les artistes. Il faut créer du lien. Je vois plutôt un bel avenir pour les jeunes. Nous, nous n’avions pas autant de facilités qu’aujourd’hui. Je continue d’écrire, d’enregistrer et de faire des clips.

 L’année dernière, j’ai sorti un album : CDS 2. Le CDS 3 sortira, quant à lui, en septembre 2021. Le dernier son est sorti le 20 mars dernier et s’appelle Nmout Halik  qui veut dire “je meurs pour toi” en traduction littérale. Pour moi, c’est plutôt au sens de “Je  t’aime”.

Interview Jean-Fabrice TIOUCAGNA