Manuella DELBECQ : « Je suis tombée amoureuse de ce quartier ».

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Manuella DELBECQ :"Je ne regrette pas mon choix". Photo Akli ALLIOUAT
Manuella DELBECQ :"Je ne regrette pas mon choix". Photo Akli ALLIOUAT

Je suis Manuela DELBECQ, présidente de l’association des parents d’élèves de l’école Marc BLOCH à La Paillade. Je suis aussi vendeuse au bar des TGV. Je viens de Paris.  J’ai quitté cette ville pour me rapprocher de mon ex-belle-famille. Au départ, je vivais au centre-ville de Montpellier.

C’est l’amour qui m’a amenée à la Paillade. J’habite les Hauts de Massane depuis fin 2016. A l’époque, je n’y avais jamais mis les pieds sauf pour aller aux puces. J’ai cinq enfants. Quatre vivent  encore à la maison et sont scolarisés de la maternelle, au collège. Quand je suis arrivée à la Paillade, je me suis posée une question : “Est-ce que je mets mes enfants dans les écoles du quartier ou pas?”. Ceux-ci m’ont dit : “Maman, on veut essayer ici”. Je me suis rendue compte qu’il y avait beaucoup de différences avec les écoles du centre-ville.

Dans un quartier où une majorité de personnes est issue de la communauté maghrébine, j’ai ressenti une différence au niveau de ma couleur de peau. Je suis noire mais je suis française aussi. C’est déjà  arrivé à certaines personnes de monter dans le bus plein et qu’on ne vienne pas s’asseoir à côté de moi. Cette réaction existe parce qu’on a laissé les gens entre-eux. Il faut dialoguer. Mes enfants, arrivant ici, se sont sentis mis à l’écart. Ils ont entendu des propos discriminants venant d’autres enfants. Par exemple, “T’es noir, j’ai pas envie de jouer avec toi.” On ne se rend pas compte que cette attitude peut être blessante.  C’est un sujet dont je parle avec mon fils. Pour lui, qui est métis et qui a été confronté à la discrimination, je lui dis qu’il faut aller au-delà de tout çà. 

Depuis que j’habite le quartier, j’ai rencontré quelques mamans hyper-motivées, qui vivent à la Paillade depuis quarante ans. Selon elles, il y avait plus de mixité avant. Aussi, les femmes osaient plus de choses. On a décidé, avec ces quelques mères de famille, de créer notre association il y a deux ans, afin de nous occuper de notre école située aux Hauts de Massane en priorité. Vous savez, si l’école va mal, c’est tout le quartier qui va mal. On espère recréer la vraie mixité. 

De manière générale, j’ai vraiment l’impression d’un endroit qui a été laissé de côté. Il faut que tout le monde redécouvre les richesses de la Mosson. 

En ce moment, je me consacre pleinement à mon activité de présidente de l’association des parents d’élèves. Il y a quarante adhérents, parents des élèves de l’école Bloch. Grâce à notre association et à notre persévérance, depuis quelques mois, il y a une nette amélioration à la Paillade : de meilleurs équipements, la réfection des rues, le  nettoyage mieux assuré et des travaux au niveau des palissades de notre école. Cela crée une dynamique et incite d’autres personnes à venir. Je suis très engagée. Les habitants des Hauts de Massane ré-apprennent à aimer leur quartier et à en être fiers. Ils n’ont plus honte de dire “J’habite là”… 

Je suis tombée amoureuse de ce quartier. Je ne regrette pas mon choix. 

Interview Jean-Fabrice TIOUCAGNA